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Jérôme MEIZOZ (Suisse)

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Jérôme MEIZOZ (Suisse) Empty Jérôme MEIZOZ (Suisse)

Message  noemiejardine Jeu 9 Mai 2013 - 14:55

Séismes
Jérôme MEIZOZ (Suisse) 41WsabnsapL._

  • Broché: 93 pages
  • Editeur : Editions Zoé (28 février 2013)
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2881828906
  • ISBN-13: 978-2881828904
Extrait: amazon


Quand mère s'est jetée sous le train, il a bien fallu trouver une
femme de ménage. Père était sur les routes dès l'aube pour le travail,
je l'entendais tousser longuement le tabac de la veille, mettre
rageusement ses habits, avaler en vitesse le pain et le fromage. Puis il
criait un nom d'enfant, le mien, par la cage d'escalier, pour que
l'école ne soit pas manquée. L'appel était si brusque, incontestable,
malgré le diminutif affectueux, qu'il signait d'un coup le retour à la
vie diurne. Père claquait la porte et le silence régnait dans
l'appartement jusqu'au soir.
Il a bien fallu trouver une femme de
ménage pour faire les gestes de mère, mais seulement ceux qui
s'adressaient aux sols, aux vitres, aux tissus. Une femme de ménage pour
les chemises de père, impeccables tous les matins, pour les chaussettes
de père qu'il ne savait pas repriser.
Elle a été là un matin d'été,
une voisine, toujours active, fumeuse, sévère mais non sans bonhomie.
Elle me connaissait depuis toujours, j'avais joué sur la Place, tous les
enfants s'éclaboussaient à la fontaine. Elle emmenait avec elle sa
fille de trois ans. J'en avais presque dix.
Ce doit être les
vacances, ou la fête d'un saint local qui nous donne congé. Je suis à
l'étage avec l'enfant qui court un peu partout, rit, grimace, s'amuse
dans ce nouvel espace. En bas, j'entends l'aspirateur cogner contre les
meubles, la serpillère serrée dans le seau, et le briquet claquer à
chaque cigarette.
Tout de suite je m'attache à elle, mignonne,
menue, irrésistible. Elle me fait confiance, me suit dans chaque
déplacement, cherche à jouer. Je lui donne des livres, des peluches.
Elle sourit.
Je suis plein d'une tristesse qui fermente en silence
comme un vin abandonné. Et le sourire ne me comble pas, il me faut
consoler un être, un autre. D'intuition, je crée le stratagème, le jeu
simple et mauvais sort de moi d'un coup, sans besoin d'y songer, venant
de loin, d'en bas.
J'attire la petite dans la chambre et en ressors
très vite, en fermant la porte derrière moi. Elle sent la clôture
soudaine, le silence, mon absence. Elle se met à geindre d'abord puis
elle pleure à chaudes larmes. On l'a abandonnée, séquestrée. Je compte
alors les secondes, car ses pleurs me pèsent. Cinq secondes, parfois
dix. Et puis j'ouvre et lui porte secours. La voilà dans mes bras,
consolée.
J'aime surtout ses larmes, et ce moment où elle se
rassure, se calme, trouve dans mes bras un état serein. Le spectacle des
pleurs puis du retour au calme m'est nécessaire, mais je ne sais
pourquoi. Il faut répéter la scène, faire et refaire le geste
réparateur. Éprouver à travers elle l'abandon puis la protection. Depuis
que personne ne peut plus le faire pour moi, je sais trop bien
réconforter les autres.
La petite retrouve son visage paisible et
rond, elle sourit à nouveau. D'un jour à l'autre, toute à son émotion de
l'instant, elle ne se souvient pas du stratagème.




Revue de presse:amazon


Tous les étés de l'enfance se ressemblent : «Les grandes vacances
n'en finissaient pas. Le temps dans la rue avait simplement cessé de
couler.» Le temps passe pourtant, et Séismes, de petits cataclysmes en
fortes sensations, par étapes qui omettent les transitions, raconte
comment on devient un homme. Le point de vue est celui de l'adulte qui
se penche sur son passé, en veillant à faire rentrer son «je» dans le
rang de sa classe d'âge. «Jeunes bestiaux» convoyés le matin au collège,
ou lâchés dans un camp scout, ils sont bloc d'énergie, goutte de
mercure, toujours ensemble, «nos adolescences irritent le Chanoine»...
L'auteur, Jérôme Meizoz (on ne prononce pas le z final, pas plus que
pour Ramuz, le grand aîné de la littérature romande), est un
universitaire et romancier né en 1967 à Vernayaz, dans le Valais. Comme
auspices pour Séismes, il a choisi une citation de Zouc : «Mon village,
je peux le dessiner maison par maison. Je le connais comme mon sac à
main.» Et une autre de Maurice Chappaz : «L'encre est la partie
imaginaire du sang.» Le livre a partie liée avec l'autobiographie et
avec l'humour suisse. En tout cas, pour l'humour, c'est évident. (Claire
Devarrieux - Libération du 28 mars 2013 )

Séismes fait
l'inventaire, ramassé - moins de 100 pages -, d'épisodes-clés de la vie
dans un village suisse, durant les années 1970, d'un jeune garçon,
jusqu'à l'âge adulte. Les séismes en question ne sont autres que ces
moments fondateurs modelant la personnalité encore en germe d'un
individu, dans un environnement où les possibles sont contrariés par les
règles et l'isolement géographique, et où la vie entre malgré tout,
comme par effraction, à la faveur d'une apparition, d'un événement. Le
texte suinte l'autobiographie par toutes les lignes, mais s'en défend,
la fiction étant invoquée en préambule. C'en est curieux : comme s'il
s'agissait que le personnage s'efface, et l'auteur en lui, pour ne
laisser place qu'aux sensations qui le traversent et le façonnent. C'est
presque un livre où le héros est un parasite : peu importe qui il est,
et ce que les événements feront de lui, seuls comptent la façon dont ils
surgissent, leur intensité et la sidération qui en résulte. Sidération
qui ne sonne pas pour autant le glas du langage ni n'entame l'acuité du
regard de Meizoz, en mode caméra subjective, avide de capter tout
frémissement du monde alentour. (Dominique A. - Le Monde du 28 mars 2013
)










Je n'avais jamais lu cet auteur...eh bien, ai vraiment apprécié. C'est très vivant.
au début, ai pensé à un petit roman, mais non, c'est plutôt des nouvelles, chaque histoire pouvant se lire séparée du reste..
l'ambiance d'un village suisse est très bien rendue, comme celle de l'école dirigée par un chanoine...
juste à un endroit, il parle d'un metro....alors fus un peu perdue.....dans les années 70, ne vois pas quelle ville de mon pays avait un métro....(Lausanne?)
au fond peu importe, c'est le rythme et les pensées de ce jeune garçon qui accrochent....,


Jérôme Meizoz est né en 1967 à Riddes (Valais)
Jérôme MEIZOZ (Suisse) Images?q=tbn:ANd9GcQV5V5Zym-m9u5MsvVI2Kg-MfevlMLiODN2ewpwwiBYNSajxrc-9Q
Jérôme Meizoz est aussi chroniqueur littéraire dans des revues suisses et françaises (Le Temps, Domaine public, Europe, etc.) et est l'auteur d'ouvrages de fiction. Ces récits abordent la mémoire familiale et sociale comme dans Morts ou vif (Mention "Livre de la Fondation Schiller" 2000), Jours rouges en 2003, Père et passe en 2008 ou Fantômes en 2010.

En 2000, il reçoit le Prix d'encouragement de l’Etat du Valais et le Prix Alker-Pawelke en 2005. Il fait partie de la Fondation Ramuz et de Pro Litteris. Il a aussi été membre du Groupe d'Olten et depuis 2011 du Conseil de la culture du canton du Valais.



ma note: 4/5
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Message  Lacazavent Jeu 9 Mai 2013 - 18:12

Very Happy J'aime beaucoup ce que publie cette maison d'édition, merci Noemie je vais retenir ce titre.

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Dernières lectures : L' Intérêt de l' enfant de Ian McEWAN (4/5), Un week-end dans le Michigan de Richard Ford (4,5/5)(Frank Bascombe T1), [/i]L' Homme du verger d' Amanda COPLIN (4/5), La Pyramide de glace J-F Parot (3,75/5)(T12)
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