Charles BURNS

Charles BURNS est né en 1955 à Washington. Il s'est fait connaître par son travail dans le magazine Raw d'Art Spiegelman au milieu des années 80. Il a participé à des projets très variés, en plus de la BD : couverture d'albums d'Iggy Pop, campagnes de pub, ... Il a consacré plus de 10 ans à la série Black Hole, initiée en 1995. L'intégrale de cette série est parue en 2006 chez Delcourt et a été primée par l'un des "Essentiels" du festival d'Angoulême en 2007.



Je pourrais vous présenter Black Hole en disant : C'est l'histoire d'Elisa qui aime Keith, qui lui aime Chris, qui elle aime Rob, etc
Ou en disant : Une terrible maladie sexuellement transmissible touche les ados dans une ville des Etats-Unis vers le milieu des années 1970 et provoque chez eux des symptômes divers : boutons énormes, nouveaux membre qui poussent, mues de peau, déformation du visage, etc
Ou encore : C'est une BD sur la jeunesse américaine qui se drogue et qui boit
En fait, Black Hole, c'est tout ça à la fois et surtout davantage : une incroyable BD qui nous parle du quotidien, des désirs, des délires, des excès, des souffrances d'une jeunesse. Quelque part entre les hippies et David Bowie. Et cette jeunesse est confrontée à un étrange fléau, une maladie à l'origine inconnue et qui ne marque pas ses victimes de la même façon. Certains peuvent continuer à vivre plus ou moins normalement, d'autres trouvent refuge dans les bois pour cacher leur anormalité. Mais ils s'y sentent menacés...
Nous suivons deux personnages : Keith et Chris, qui sont tour à tour les narrateurs de l'histoire.
Le dessin est impressionnant, en noir et blanc, très contrasté et très expressif. Certaines images sont vraiment effrayantes, d'autres magnifiques, l'ensemble est vraiment très réussi et sert bien le propos. Après avoir lu l'histoire, j'ai eu plaisir à regarder de nouveau les images, il y a quelque chose de très attirant, envoûtant dans le dessin de Charles Burns.
Je suis rentrée instantanément dans cette histoire et j'avoue avoir eu besoin de m'en détacher de temps à autre au fil de ma lecture, car je commençais à avoir peur (je suis très impressionnable), alors je regardais autour de moi quelques instants pour vérifier que je n'étais pas dans les bois ! C'est une BD très prenante, pleine de suspens, de sentiments aussi. La drogue et l'alcool y occupent une place importante et de ce fait le rêve et les hallucinations, voire les visions, sont développés sur plusieurs pages et nous plongent dans une ambiance encore plus étrange.

Voici un commentaire de l'auteur sur son oeuvre qui je trouve est très éclairant :
Charles Burns : "Pour moi, cette histoire aborde de nombreux aspects de l'existence humaine : la sexualité et la transition de l'enfance à l'âge adulte. Je fais vivre à mes différents personnages toutes ces phases pour montrer les nombreuses manières d'aborder cette problématique... Il s'agit moins d'une transformation que de la manifestation d'un état psychique qui prend des proportions physiques. Une des filles de mon histoire par exemple veut se recréer elle-même. Elle perd sa peau et mue comme un serpent. Elle tente litteralement d'échapper à sa propre peau. Un autre personnage a une deuxième bouche au niveau du cou. Il s'agit d'une voix inconsciente qui émane de lui pour prédire le futur. Moi-même, je me sentais un peu monstrueux pendant ma puberté. Tout cela se passe à l'intérieur de nous bien sûr, mais je me sentais vraiment à côté de la plaque."

Ma note : 4,75/5

Merci beaucoup Ysla pour me faire découvrir cette bd, le sujet m'intéresse énormément, de par mon travail surtout et parce que j'ai un ado à la maison.