Jean-Marie LACLAVETINE (France)

De : Sahkti1 --- Envoyé : 2006-04-06 06:20

Matins bleus
Editions Gallimard
ISBN 207077208X

"Ils étaient lourds. Je les vois, je les entends, ils étaient lourds et je suis léger, je tends vers eux mes mains tâchées de peinture bleue, je tombe, je vole, je nage dans l'air de mai comme une eau frâiche. Je vois au bout du quai une amoureuse (...)"
Une journée, une seule. La vie d'une journée. Celle du 19 mai. Des heures qui la composent et des êtres qui la font vivre. Une journée teintée du bruit des trains qui entrent et qui partent, emportant avec eux leur flot de voyageurs. Des voyageurs qui attendent, qui regardent, qui parlent ou se taisent, qui lisent le journal, qui pensent... C'est tout un monde en effervescence, même invisible, dans une gare, et Jean-Marie Laclavetine rend assez bien ce frétillement du temps et des gens. Des gens qui sont là, qu'on observe, avec une certaine tendresse, un regard de plus en plus proche. Une foule de personnages bigarrés, avec autant d'histoires, autant d'anonymat et de soudaine célébrité dans le regard du lecteur à travers la plume de l'auteur. Une foule de portraits, comme dans "Madrid ne dort jamais" de Polet, le même principe et ici une journée, une gare, en environnement familier de la plupart des gens, ça doit contribuer au charme de l'ouvrage. Une fin humaine aussi, celle d'un drame, du désespoir, de ce qui ne pourrait être qu'un fait divers clôturant le 20 heures.

Laclavetine joue avec les âmes et les destinées, avec une langue chargée, presque charnelle, très attaché qu'il semble être à ses personnages. J'ai apprécié la rigueur de son trait et le goût du détail. Parfois un peu moins quelques passages, mais dans une telle floraison de portraits, tous ne peuvent intéresser avec la même intensité. Comme dans la vie. On aime et on aime moins...

Note: 3,5/5