Pierre MÉNARD (France)

Mais qu'est-ce que c'est que ce livre-ci ? A-t-on la moindre idée d'écrire un livre pour justement encourager à ne pas lire (pas seulement lui mais toute la production littéraire) ? Et que penser de la dédicace : À tous ceux qui ne liront pas ce livre ?

C'est non pas 20 mais 26 bonnes raisons qui toutes invitent à jeter sa bibliothèque (à surtout ne pas en fréquenter), à prôner un autodafé généralisé voire même à inviter à appliquer une censure sur ces ramassis de papier que sont les livres. Et je dois dire que l'auteur ne se départ pas d'humour et que son petit essai fourmille de bonnes idées, d'anecdotes franchement intéressantes et qu'il mène sa démonstration avec talent. Même s'il s'auto-flagelle à de multiples reprises, son essai fait partie de ces livres agréables qui incitent à continuer de lire.

Quelques morceaux choisis :

Extrait du "4. Lire rend pédant" :

Le lecteur, parce qu'il a lu un livre d'un homme intelligent, se croit intelligent lui-même. Quelle absurdité ! Diantre, ce n'est pas parce que l'on regarde James Bond qu'on est agent secret. (p. 25)

Extrait du "12. Lire est économiquement aberrant" :

Lire l'intégralité de "La Comédie humaine" (137 livres, 20 millions de mots) prend 420 heures, soit 12 semaines de 35 heures. Au coût du Smic, cela représente la somme de 3 960,60 euros. (p. 60)

Et je dois me restreindre car beaucoup de passages sont savoureux (je le hérisserais bien de marque-pages). Certes il y a de la mauvaise foi et certains arguments sont un peu tirés par les cheveux voire misogynes (mais c'est tout à fait dans le ton) qu'on passe volontiers outre car le simple fait d'avoir écrit un tel livre est déjà brillant en soi. J'ai comme dans l'idée que si vous achetez ce livre (message subliminal : faites-le, faites-le !), vous ne bouderez pas votre plaisir et contaminerez d'autres lecteurs que, dans ce cas précis, nous pourrions définir comme des cas désespérés de la société.

Je me doutais bien qu’un livre portant ce titre serait plus un essai traitant avec humour de la lecture et ses excès qu’une apologie contre ce plaisir que j’aime tant. Je ne cherche pas vraiment à arrêter de lire mais j’étais curieuse de savoir quelles raisons pourrait vraiment me décider à arrêter de lire (euh, inimaginable). 

Et bien, ouf, j’ai bien ri et souri aux titres et aux contenus des chapitres, Lire rend laid, lire est dangereux ou Lire est économiquement aberrant entre autres, mais mon temps de lecture n’a pas diminué. En fait, les bonnes raisons sont plutôt des excuses pour parler des auteurs et apprendre quelques histoires sur eux. Et effectivement, on apprend pas mal de choses sur Marcel Proust, Georges Orwell et autres comparses. Certaines raisons sont un peu tirés par les cheveux ou d’autres absurdes (Lire, c’est pour les femmes), mais je ne regrette pas d’avoir lu ce petit essai qui m’a fait passer un bon moment ! (Et je suis contente qu’il ne m’ait pas convaincu !)