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Nicole BELANGER (Canada/Québec)

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Nicole BELANGER (Canada/Québec) Empty Nicole BELANGER (Canada/Québec)

Message  gallo Sam 29 Nov 2008 - 15:30

Née en 1962 à Montréal, Nicole Bélanger, graphiste de formation, poursuit durant 15 ans, "par les soirs", des études en lettres, en scénarisation et en publicité à l'UQAM ainsi qu'à l'Université de Montréal. Romancière, nouvelliste, scénariste et auteure de textes de chansons pour les Colocs, entre autres, elle finance ses projets personnels en travaillant en publicité à titre de conceptrice et directrice artistique.

De 1998 à 1999, elle écrit et lit un billet bimensuel à l'émission de Joël LeBigot, Samedi et rien d'autre, à la radio de Radio-Canada. Membre du groupe des Zapartistes du café-théâtre L'Aparté, elle écrit des textes d'humour dans le cadre des soirées de théâtre politique. Son premier roman, "Salut mon roi mongol!", publié en 1995, a reçu un accueil enthousiaste de la critique. Présentement en cours d'adaptation, ce roman sera porté au grand écran en 2002. Son second titre, "Un jour, nous épouserons Romain Gary", a été traduit en portugais et publié par l'Oficina do livro. Elle est membre de l'Union des écrivaines et écrivains québécois et de la SARTEC.
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De: Polo

Nicole Bélanger - Un jour, nous épouserons Romain Gary
(éd. Les Intouchables, 2000, 164 p.)

Sujet : dédoublement de personnalité

Les auteurs montréalais campent généralement leurs romans dans l'arrondissement branché de leur ville, soit le Plateau Mont-Royal. Depuis Michel Tremblay, on s'y est attaché et on en parle ad nauseam. Nicole Bélanger ne fait pas exception à la règle. Cependant elle évite le portrait type du quartier. Heureusement! Elle se sert de ce décor pour situer ses personnages, en particulier, Tiffany, l'héroïne qui renie son identité.

Née d'une génitrice agaçante, Tiffany tente de fuir cette mère, dont les liftings et les liposuccions se suivent à un rythme endiablé pour sauvegarder son apparente jeunesse. Comment vivre avec une femme esclave des standards de la beauté commerciale? On la quitte pour aller habiter un sous-sol miteux du Plateau Mont-Royal, un microcosme composé d'artistes, de professeurs et d'étudiants.

Tiffany trouve sa vie ennuyeuse. Elle travaille dans un bar, où les corps féminins ont quelque intérêt en autant qu'ils servent la lubricité des soi-disant bien-pensants. L'héroïne a un idéal plus ambitieux. Elle voudrait bien trouver une voie à son énergie débordante, voire névrosée. Pour le moment, elle héberge un immigrant clandestin, dont l'amour à son égard s'inscrit dans la liste des faibles probabilités; elle porte aussi une attention particulière aux paumés, en particulier à une jeune punk, qui se détruit aux substances illicites; et elle prête une oreille attentive à un marxiste-léniniste, qui habite l'appartement au-dessus du sien. Ce n'est pas assez pour alimenter sa flamme.

Un jour, une collègue de travail entreprenante lui propose une activité plus gratifiante en l'initiant à la lecture, en particulier à celle des oeuvres de Romain Gary. La voilà sauvée. Elle a trouvé sa voie. Le duo se lance même en affaires avec un commerce de cantine mobile. Les deux jeunes femmes font la tournée des milieux de travail pour offrir aux ouvriers des repas à l'heure du lunch. Et dans leurs temps libres, elles lisent les romans de Romain Gary et d'Émile Ajar que leur fera connaître un libraire en leur révélant qu'il s'agit du même auteur.

Tiffany développe non seulement une passion pour les oeuvres de l'auteur, mais une obsession pour cet homme auquel elle s'identifie. Refusant ce qu'elle est, il ne lui reste plus qu'à épouser la personnalité de Romain Gary. C'est la parfaite symbiose entre la lectrice et lui. L'un a cherché la fuite en se cachant derrière Émile Ajar, Tiffany l'imite en se cachant derrière Romain Gary. Pour l'héroïne, le seul moyen de trouver le bonheur, c'est de revêtir les oripeaux d'autrui. Le peu d'estime que l'on a de soi mène souvent à la dépossession de ce que l'on est. C'est le cas chez l'héroïne qui envisage même de visiter tous les lieux fréquentés par son modèle. Elle pousse tellement loin l'emprunt de sa nouvelle identité qu'elle réussit à faire croire à sa mère qu'elle est morte.

C'est un roman d'une grande richesse sur le phénomène identitaire. Avec brio, Nicole Bélanger plonge au coeur du problème sans tomber dans le piège du psychologisme. Ses personnages s'incarnent dans un vécu facilement identifiable : le monde des bars, le commerce de la cantine ambulante, les immigrants clandestins, les jeunes paumés, les femmes vieillissantes et, évidemment, Romain Gary. Cette oeuvre unit tous ces éléments en un tout intéressant. Le sujet qui se prête aux tournages en rond évolue sans cesse. L'auteure lance implacablement son héroïne vers son ultime perte d'identité. La trouvaille, c'est de faire coïncider l'univers d'un lecteur avec celui de son auteur préféré sans le plagier. Et l'écriture ne vient pas ternir ce beau cas du dédoublement de la personnalité.

Note : 4.5/5
Polo
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