Marcelle SAUVAGEOT (France)

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Marcelle SAUVAGEOT (France) Empty Marcelle SAUVAGEOT (France)

Message  Invité Mar 2 Déc - 18:37

De : Flo7717 (Message d'origine) Envoyé : 2004-08-05 11:46

Laissez-moi (Commentaire)
nb : "Commentaire" est le titre initial de l'ouvrage.
Phébus / 112 pages

Une jeune femme malade, dans le train qui la conduit au sanatorium dont elle ne reviendra peut-être pas, lit la lettre de rupture que vient de lui remettre son amant - et lui répond au nom de cette Vie qu'elle risque de n'avoir plus longtemps à vivre, mais qu'elle persiste à vouloir exempte de toute tiédeur, de tout compromis.

Ce petit livre m’a donné un peu de mal car pendant longtemps je me suis demandée s’il parlait au cœur ou à la tête. Car Marcelle Sauvageot parle d’amour de façon à la fois passionnée et froide. Elle évoque sa vision de l’amour : absolu et donc sans compromissions. Elle rejette ce simulacre d’amitié que lui propose son ancien amant car pour elle l’amitié n’est pas un pis-aller dérivant d’un amour mort mais bien une relation pleine et exigeante. Elle se moque de sa petitesse, de son étroitesse avec beaucoup d’ironie mais on sent bien qu’elle a été blessée. Ce qui fait la force de ce livre, c’est que l’auteur écrivait pour elle. Sa prose est donc bien éloignée des livres nombrilistes ou l’auteur cherche à « faire beau », à parler de lui en posant. Ici, c’est un style limpide qui frappe le lecteur. Ce qui transparaît de ce texte, c’est la force morale de l’auteur. Parce qu’elle sait que la maladie risque d’avoir raison de sa vie, elle affirme sa volonté de vivre sans demi-mesure. Ces paroles ont une portée philosophique sur la définition et le sens de l’amour. Qu’est-ce donc s’aimer ? Et Marcelle Sauvageot de répondre avec passion, force et clarté mais aussi modernité. Car ce texte écrit en 1934 est étonnamment moderne. L’auteur dépasse l’idée encore ancrée à l’époque selon laquelle une femme est une émanation de son mari. On peut songer parfois qu’elle fait preuve d’idéalisme. Sa vision de l’amour absolu semble déraisonnable. Et pourtant, n’est-ce pas une merveilleuse leçon … C’est un livre qu’il faut déguster car il nous appelle sans cesse à réfléchir.Phébus / 112 pages

Note : 4.5/5



De : Rotko21 Envoyé : 2004-09-15 08:21

Laissez-moi

C'est en ressemblance avec "laissez-moi" de Marcelle Sauvageot que Jean-Marc Roberts publie "je te laisse" au Seuil.

Une lettre de rupture d'une femme à son amant, mais cette fois-ci très méchante et fertile en reproches tous azimuths. D'autant que cet amant qui se prétend écrivain produit, aux yeux de la belle, que des livres "rachitiques". Pour couronner le tout, des règlements de compte sur les mondes respectifs qu'ils fréquentent tous deux. Avec ce livre, et cette hargne et ce mépris, on est loin de Marcelle Sauvageot dont les qualités morales font une belle figure de roman.

Je trouve ce texte très beau, notamment la noblesse d'âme de celle qui l'écrit. Le "commentaire" devient un chant d'amour tragique, une oeuvre étonnante par l'ironie, la clairvoyance, le refus des propos et des sentiments en demi-teinte.

Ce texte fait-il partie des "écrits intimes", à soi seul destinés ? J'en doute, tant la construction est savante, les accents, "sincères". Mais d'une sincérité qui doit tout à une grande maitrise, au coeur même de la souffrance et de la passion.

C'est pourquoi j'ai pensé à Madame de la Fayette, l'auteur de "la princesse de Clèves" et à Madame de Bauséant, l'héroïne de Balzac.

Mais j'ai pensé aussi aux "lettres de la religieuse portugaise". Un livre écrit non par une religieuse, mais par Guilleragues, un écrivain talentueux.

La langue y est très pure, les analyses, très fines. C'est pourquoi je vois moins dans ce texte une "confession" du coeur qu'un texte écrit par un auteur, pleinement conscient de son entreprise.

Quant à Jean Marc Roberts, le titre "je te laisse" et le contexte, une lettre de rupture, ne peuvent faire douter de la reférence



De : Sahkti1 Envoyé : 2006-09-28 12:17

Laissez-moi (Commentaire)
Editions Phébus, ISBN 2859409629

Quel dommage, souvent, que la redécouverte et la reconnaissance littéraire ne puissent s’effectuer qu’après le départ des auteurs pour le grand voyage. Merci à Jean-Pierre Sicre de rendre ce bel hommage à Marcelle Sauvageot, décédée de la tuberculose à Davos. Ce récit, initialement intitulé "Commentaire", l’auteur l’a rédigé d’un trait, relatant la rupture et la souffrance affective qu’elle est en train de vivre. Un texte brut, empli d’émotion. Comment aurait-il d’ailleurs pu en être autrement lorsqu’on apprend que son amant va épouser une autre alors que vous venez de lui apprendre que vous êtes gravement malade. Avec la subtilité et l’intelligence de Marcelle Sauvageot qui, jamais, ne tombe dans l’esprit revanchard ou colérique contre son amant. Elle préfère (avec raison) disserter sur l’amour et ses mensonges, sur la passion, sur les compromis indispensables, sur tout ce qu’elle a donné et reçu.

C’est beau, sincère, une confidence à soi-même sans faux-semblant, Marcelle Sauvageot sait qu’elle va mourir, à quoi lui servirait-il de se mentir ? Et puis quand on écrit pour soi et uniquement à soi, on peut tout dire, sans souci de plaire ou d’écrire de jolis mots, c’est l’occasion de tout sortir, de s’analyser, voire se juger. Avec le regard parfois peu indulgent de celle qui va bientôt partir et qui ne veut rien se passer. Ce texte était très intime, seulement 150 exemplaires à l’origine destinés aux proches de Marcelle Sauvageot. Brise-t-on son intimité en rééditant ce récit (qui l’a été antérieurement à plusieurs reprises) ? Je ne le pense pas, Phébus lui donne vie et c’est très bien.

Si l'on peut évoquer les notions de culpabilité et de compassion à propos des hommes qui entourent le récit de Marcelle Sauvageot, il convient d'ajouter à ces termes les notions d'admiration et d'interrogation devant la force qui anime l'auteur alors qu'elle sait qu'elle va mourir.
Certaines phrases de son cri du coeur sont bouleversantes et ne peuvent laisser de marbre, elle y dénonce les convenances sociales de son amant ("Notre amitié sera une très jolie chose à l'avenir, nous nous enverrons des cartes postales pendant nos voyages et des bonbons en chocolat au Nouvel An. Croyez-vous que ce soit nécessaire ?"), elle livre sa blessure sans pudeur, elle souffre ("Je comprends tellement bien qu'on ne m'aime plus"), elle s'en va ("J'ai mal et quand j'ai mal, je m'éloigne sans retourner la tête. Ne me demandez pas de vous regarder par-dessus l'épaule et ne m'accompagnez pas de loin. laissez-moi.") Cette lucidité, cette mise à nu impressionnent au plus haut point ! Charles du Bos s'est rendu à Davos pour rencontrer Marcelle Sauvageot le 2 janvier 1934, elle mourra le 6, quatre jours plus tard... l'émotion a été si forte pour lui !

Ce livre c'est une leçon d'humilité et de force à la fois, avec un courage étonnant de la part d'une mourante qui refuse d'abdiquer, mais sait qu'elle va perdre son combat. Il est si dur de ne savoir comment réagir face à la mort qui se profile, on se sent si faible et elle, Marcelle Sauvageot, si belle, qui dégage autant de force... Admirative je le suis, comme ces hommes ont dû l'être aussi. Enfin je l'espère. Pour eux et pour elle.

Ma note: 5/5



De : Pilou Envoyé : 2007-02-17 02:32

Laissez-moi

"Laissez-moi" est effectivement une perle rare, un texte qui vous remue de fond en comble, sans doute en raison du fait que ce n'est pas un ouvrage, pas un travail littéraire, mais plutôt à classer dans la catégorie journal intime d'une amoureuse passionnée qui sait qu'elle va mourir.

A lire impérativement avant ou après, de préférence après, le texte de la princesse Constance de SALM, exactement dans le même registre et tout aussi exceptionnel qui s'intitule "Vingt quatre heures d'une femme sensible" chez Phebus. Paru en 1824, il fit l'admiration de Stefan SWEIG et de Marcelle SAUVAGEOT. Une femme très amoureuse, voit un soir son amant partir au bras d'une autre. Elle lui écrit, en vingt quatre heures, quarante trois lettres, certaines de quelques lignes seulement, pour lui dire son amour et sa souffrance. Superbe!

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Marcelle SAUVAGEOT (France) Empty Re: Marcelle SAUVAGEOT (France)

Message  Aurore Jeu 1 Mar - 15:05


Laissez-moi (commentaire) - Marcelle Sauvageot
(Phébus, 2004, 124 p.)


Marcelle SAUVAGEOT (France) Img005308_1
Je prétais dernièrement l'oreille à un podcast (je déballe ma bibliothèque sur France Inter) où Elsa Zylberstein dévoilait des passages de ses livres préférés. Et c'est ainsi qu'elle en est venue à évoquer Laissez-moi de Marcelle Sauvageot dont je n'avais jamais entendu parler auparavant et que je n'aurais sans doute pas remarqué sur les étagères. Mais voilà, l'histoire d'une femme délaissée par son amant m'a tout de suite parlé.

C'est un récit autobiographique que celui-ci où l'auteur, se battant contre la maladie, se trouve de plus trahie par son amant qui l'abandonne pour une autre. Marcelle Sauvageot a une plume douloureusement brillante car les lettres retranscrites issues sont éloquentes d'une force de vivre, d'un sentiment pur qu'est l'amour interrompu à son apogée. Il paraît lâche le traitre qui annonce ses fiançailles ailleurs. Ne l'aimait-il pas pour de bon? Simulait-il la jalousie? On se doute que le récit est d'un autre temps où le mariage est inévitablement évoqué sitôt qu'une relation de couple s'instaure (stabilité, sécurité et famille sont les maîtres mots).

Nous nous ferons des visites ; nous nous dirons nos projets au moment où il se réaliseront, afin de vexer un peu l'autre et de ne pas subir sa commisération en cas d'échec ; nous prétendrons être ce que nous croyons être et non pas ce que nous sommes ; nous nous dirons beaucoup de "merci", "excusez-moi", des mots aimables que l'on dit sans penser. Nous serons des amis. Croyez-vous que ce soit nécessaire? (p.38)

Je crois qu'il n'est pas nécessaire d'être quitté ou dans la peine pour être sensible aux mots vibrants de Marcelle Sauvageot. Son témoignage est bouleversant d'autant plus quand on connait sa courte vie et son combat éprouvant contre la maladie (et qu'elle a malheureusement perdu).
C'est un vrai beau texte sur la puissance des sentiments, sur l'amour déçu mais aussi sur la foi en l'avenir, bien qu'il soit autre et imprécis.


4/5

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