André LANGEVIN (Canada/Québec)

De : Le-réaliste-romantique --- Envoyé : 2006-06-13 22:04

André Langevin, auteur québécois
1927-

L'information suivante provient du site L'ÎLE (http://www.litterature.org)

Romancier et dramaturge, André Langevin fait des études classiques au Collège de Montréal, il est chroniqueur littéraire au journal Le Devoir en 1946, puis devient, en 1948, réalisateur à Radio-Canada jusqu'à sa retraite en 1985. Il a aussi collaboré à différents journaux comme Notre Temps, Le Nouveau journal, à la revue Liberté et au magazine Maclean. André Langevin a également écrit des téléthéâtres et le scénario du film d'Arthur Lamothe Poussière sur la ville.

André Langevin a obtenu le Prix du Cercle du livre de France en 1951 pour Évadé de la Nuit et en 1952 pour Poussière sur la ville. Il a aussi remporté le Concours d'oeuvres théâtrales du T.N.M. avec L'Oeil du peuple en 1957 et reçu le Prix Laliberté en 1967 et le Prix littéraire de la Ville de Montréal pour son livre L'Élan d'Amérique. Il publit aussi Une chaîne dans le parc en 1974. Il a obtenu le Prix Athanase-David en 1998.

Le temps des hommes
1956

"Avant de tirer le rideau Yolande regarda la route. Rien, ni personne. La neige avait cessé. Restait un espace blanc, morne, lourd où se confondaitent les maisons, les arbres, la route. Seules les longues cheminées de la papeterie, de l'autre côté de la rivière, conservaient une silouhette dans le paysage privé d'ombre. Quelque part du côté de la ville, un chasse-neige labourait le silence."

En plein hiver québécois, cinq hommes doivent monter dans la forêt de conifères du nord de Scottville pendant deux semaines pour y bûcher un chemin. Ils doivent préparer l'accès à une nouvelle zone de coupe pour la papetière, la compagnie qui a construit la ville et qui possède toute la région (nous sommes au début des années cinquante). Le groupe est très hétéroclyte: Gros-Louis, le boss, homme puissant et sûr de lui, Baptiste, le raisonnable, bon père de famille qui monte au bois pour l'argent afin de s'établir pour de bon sur sa terre, Pierre Dupas, dit le curé, mystérieux, en forêt douze mois par année, on ne lui connait ni famille, ni amour, Maurice, le cook, obèse, peureux et toujours la victime du groupe et finalement Laurier, jaloux et soupçonneux. Cette expédition ne sera pas tranquille, car tout juste avant le départ, Laurier surprend Yolande, sa femme, sortant du camion de Gros-Louis. Une bagarre s'ensuit, mais tourne court, car aucun adversaire ne peut résister à Gros-Louis. Les hommes partent quand même au bois dans leur cabane isolée, mais Laurier distille sa colère. Le camp isolé dans la blancheur angoissante, la promiscuité obligée, le silence qui rend fou... On sent que ce contrat ne finira pas bien. Le livre se concentre principalement sur les personnages du curé et de Laurier, mais on est le témoin tour à tour de la vie inérieure de chacun des personnages. André Langevin excelle à illustrer le Québec sombre de ces villes industrielles de l'époque.

"Scottville qui grugeait lentement l'immense forêt pour s'en nourrir était atrocement nue, toute en brique et en béton. Les arbres avaient été abattus lors de sa construction. Et vingt-quatre heures par jours les usines géantes soufflaient au-dessus des maisonettes leur haleine empoisonnée, leur exhalaison de pourriture et de vomissement."

C'est presque un soulagement lorsque le groupe quitte enfin la ville pour le bois purifié par une chute fraiche de neige. Toutefois, la beauté du manteau uniforme blanc provoque rapidement l'angoisse. Tout comme dans Poussière sur la ville, le protagoniste se retrouve à la merci de son milieu, il subit son existence plutôt que la vivre. Dans Le temps des hommes, les personnages sont typés, mais ils témoignent bien de leur archétype, l'auteur nous fait entrevoir succintement chacune des vies. Ce livre est sombre, mais les hommes y combattent pour conserver un peu de dignité.

Note : 4/5