François RABELAIS (France)

De : louve-épine Envoyé : 22/03/2006 17:31

François Rabelais est mort depuis longtemps (1494 - v. 1553), mais avant ça, il a fait plein de choses dans sa vie.
Il a entre autres été moine (franciscain, puis bénédictin), ainsi que médecin, d'abord à Montpellier (LA ville de référence pour la médecine au XVIe siècle) puis à Lyon, où il part s'installer en 1532. Là-bas, il écrit de jolis ouvrages médicaux, et décide de prendre un pseudonyme (Alcofribas Nasier, un simple anagramme de François Rabelais) pour publier son premier roman : Pantagruel (1532).
(oui, je sais, il s'installe à Lyon et écrit son bouquin la même année, mais c'est vraiment pas de ma faute.)

Suivra en 1534 la parution de Gargantua, toujours sous pseudonyme, précaution non négligeable puisque ces livres seront condamnés par la Sorbonne. 1534 est aussi l'année de l'Affaire des Placards, et je le précise rien que parce que mon professeur adore nous le rappeler, donc on peut supposer que ça a eu une certaine répercussion sur la vie et les livres de Rabelais.
Rabelais qui, d'ailleurs, en aura marre d'avoir un pseudonyme qui ne ressemble à rien, et qui décidera, dès 1546, soit l'année de parution du Tiers Livre, de signer de son propre nom. Et j'imagine qu'avoir obtenu un privilège royal pour publier ce livre a bien aidé le petit François à enfin assumer son identité d'écrivain. L'édition complète du Quart Livre date de 1552 - et le Cinquième livre, dont le contenu est apocryphe, voit le jour en 1565.

Après une présentation aussi palpitante, je me permets de dire deux mots sur ces cinq livres. La première remarque à faire, c'est que Gargantua est le père de Pantagruel, or le fils est le premier à avoir un livre à son nom, ce qui bouleverse en quelque sorte l'orthodoxie chronologique (c'est mal dit, mais on comprend quand même, hein oui ?).
Pantagruel raconte l'enfance et l'éducation du géant, sous des airs de bouffoneries et de plaisanteries.
Gargantua est ciblé sur les aventures du papa, et le ton est déjà plus sérieux, réfléchi.
Le Tiers Livre rompt avec le modèle épique - ici, Panurge (un ami de Pantagruel) s'interroge : doit-il se marier ou non ?
Le Quart Livre narre le voyage en mer de Pantagruel, Panurge et compagnie, qui partent rendre visite à un oracle (pour savoir si Panurge doit réellement se marier ou pas).
Et dans le Cinquième Livre, il s'agit de la fin du voyage, et de la consultation de l'oracle.


Le Tiers Livre

Livre de poche, 490 pages

490 pages, ça peut faire peur, en même temps, cette édition (en moyen français) n'écrit le texte que sur la page de droite, donc ça réduit considérablement le nombre de pages à déchiffrer (surtout que la page de gauche est réservée aux annotations). (quatre fois le mot "page" dans la même phrase, je crois que je viens de battre mon record).

L'histoire est d'une simplicité affligeante, et je l'ai dit un peu plus haut : Panurge, passionné par l'argent, la bouffe et les femmes, se dit que ça pourrait être bien, de se marier. Mais comme c'est une décision ô combien difficile à prendre, il décide de consulter des dizaines de personnes, qui lui disent toutes la même chose : Panurge se mariera, d'accord, mais il sera : cocu, battu, et volé. Bizarrement, l'anti-héros est un peu refroidi par ses prédictions, et refuse de croire tous ceux qui lui diront des choses aussi tristes. Alors finalement, au bout de 490 pages, il ne sait toujours pas s'il va se marier (et c'est pour ça qu'il part consulter un oracle, dans les livres suivants).

Un de mes anciens professeurs nous avait dit un jour (un mardi matin, d'ailleurs) : "Si vous n'avez pas le moral, lisez Rabelais, c'est à se tordre de rire".
Moui.
Honnêtement, j'ai trouvé ça long, laborieux, ennuyeux, compliqué. Un peu misogyne, aussi, mais ça, c'est l'époque qui le voulait... Un peu lourd également, avec un humour bien gras, des blagues dignes de mon beau-frère quand il est bourré, quoi. C'est dire.

"Il t'est defendu ; tu en doibs doncques manger, ou tu ne serois pas femme."

Malgré tout, oui, je le confesse : j'ai ri. Parfois. Puis Rabelais a une grande culture, et une grande bibliothèque, puisqu'il adore citer Homère, Virgile, Sénèque, et autres petits plaisantins. Ce qui pourrait être gênant, c'est qu'il ne se passe rien - ce n'est qu'à la fin du Cinquième Livre qu'on sait si Panurge se marie réellement ou non (imaginez, le suspense est insoutenable) (mais comme je suis gentille, je vous le dis : oui, il se marie).

"Panurge se doibt-il marier, ou non ?
- Tous les deux, respondit Trouillogan.
- Que me dictez-vous ? demanda Panurge.
- Ce que avez ouy, respondit Trouillogan.
- Que ay je ouy ? demanda Panurge.
- Ce que j'ay dict, respondit Trouillogan.
- Ha, ha, en sommes nous là ? dist Panurge. [...] Et doncques, me doibz je marier ou non ?
- Ne l'un ne l'aultre, respondit Trouillogan."

Alors je ne sais pas. Je ne sais pas si j'ai aimé ou non, et surtout je trouve ça gênant de critiquer un tel livre sans être réellement au courant du contexte social, je trouve ça gênant de critiquer un "classique", parce que c'est presque prétentieux qu'une p'tite de 20 ans ose s'attaquer à Rabelais.
C'est pourquoi je me permets de ne pas mettre de note.

Si vous aimez l'humour grivois, les discours sans fin, les personnages indécis et l'écriture du XVIe siècle, oui, vous avez des chances de vous amuser avec l'oeuvre de Rabelais.
Sinon, franchement, je crois que ce n'est pas particulièrement nécessaire de le lire rien que pour pouvoir dire que, oui, nous, on a lu Rabelais. Parce que hein, bon.



De : ThomThom12932 Envoyé : 22/03/2006 23:35

Seul petit bémol à ta présentation (mais tu pourras toujours dire que c'est la faute de tes profs ) : comme pour beaucoup d'auteurs de l'époque, il y a débat autours de la paternité des oeuvres. Autant il est sûr et certain que "Pantagruel" et "Gargantua" sont des livres de Rabelais, autant personne n'a jamais pu affirmer avec certitude que le "Tiers" et le "Quart" étaient de lui. Quant au "Cinquième" c'est encore pire : les critiques s'écharpent depuis des lustres sur le sujet, mais il est plus que probable qu'il ne soit pas du tout de Rabelais.

Franchement pour les avoir tous lus je ne peux pas me prononcer sur les quatres premiers, mais pour le cinquième j'aurais tendance à croire ceux qui prétendent que ce n'est pas de lui.