François BLAIS (Canada/Québec)

De : Calepin0 (Message d'origine) Envoyé : 2008-04-27 19:20

Iphigénie en Haute-Ville, de François Blais

Éditions L'instant même
2006, 200 pages

C'est l'histoire d'un jeune homme qui découvre le numéro de téléphone d'une fille dans les toilettes publiques et l'appelle tout bonnement. S'en suit le rapprochement des deux protagonistes plutôt anti-sociaux par le biais d'Internet où chacun tente d'y tirer quelque chose de manière détournée et fantaisiste.

Une belle découverte que ce roman. Cynique, rafraîchissant, intelligent, étrange... un peu tout à la fois. Décidément, la plume de Blais se démarque de l'image de la littérature québécoise a l'habitude de présenter, ou du moins, ce que j'ai pu en voir moi-même. Il s'implique également dans le roman en passant moult commentaires amusants, un brin intello, glisse quelques blagues (qui portent une certaine forme de critique sociale) appuyées sur le contexte culturel québécois (certains lecteurs qui ne s'y connaissent pas s'y perdront, par contre) et regarde vivre ses personnages avec nous.

L'histoire demeure très simple. L'intérêt vient surtout des échanges loufoques et mi-sérieux des personnages. De véritables phénomènes sociaux en soi. Bien que le roman ait très bien commencé, les histoires que s'écrivent les personnages pour s'amadouer finissent par être longues inutilement et ennuyantes. Malgré ce passage un peu à vide et un retour à des histoires plus personnelles, le roman ne récupère pas complètement son efficacité initiale.

En fin de compte, je garde le souvenir d'une lecture surprenante et très distrayante.

Note : 4/5

Les Rivières suivi de Les fantômes

Les Rivières est un centre commercial de Trois-Rivières, une ville de taille moyenne située entre Montréal et Québec. Le récit se déroule au cours d’une matinée, on passe de la tête d’une personne à l’autre, des visiteurs ou des employés. L’auteur en profite pour faire de petites analyses très amusantes de différents éléments sociaux ou de personnalité. Mais l’élément le plus grave est la disparition d’une fillette. Dans le deuxième récit, un écrivain respecté mais peut vendeur, tel Gilles Archambault, sera écrivain en résidence pour l’été dans un village de la Mauricie, soit au nord de Trois-Rivières. Bien que très rationnel, il fait face à des situations de plus en plus étranges qui mettent à mal sa raison.

Les deux récits se répondent et le livre forme un tout cohérent. Le style de François Blais est amusant et ses personnages, même lorsque antipathiques, sont intéressants. La fin du premier récit nous laisse un peu sur notre faim, mais nous en saurons plus dans le second. Dans ce dernier, l’auteur établit dès le début une excellente ambiance inquiétante. La fin bascule dans les stéréotypes du genre et semble précipitée, mais l’ensemble forme quand même une très bonne lecture.

4/5

RR

Sam

Dans un magasin de charité de Trois-Rivières, un jeune homme découvre parmi une boîte de livres un extrait du journal d’une jeune femme, Sam. Il tombe amoureux d’elle, apprend à la connaître par son journal et les autres livres de la boîte. Le roman est principalement le journal; Sam vie un peu en marge de la société, dans une maison isolée de Mauricie, critique face à sa famille et la société. Mais à la Modiano, le jeune homme décide de la retracer à partir des miettes d’information biographique et géographique qu’il peut dénicher dans les écrits et rajoute ses notes au journal. Mais Sam demeure insaisissable, où s’est-elle volatilisée?

Le journal est délicieusement acide, il caricature nombre de travers du Québec. Le livre permet aussi d’en apprendre un peu plus sur une région sous-représentée dans la fiction québécoise. Le ton est parfois un peu adolescent et de style oral, mais le livre constitue un bon divertissement.

3,5/5

RR

Un livre sur Mélanie Cabay

Mélanie Cabay est une jeune fille de 19 ans disparue à Montréal en 1994 et retrouvée morte quelques jours plus tard. Elle est née en 1975, tout comme François Blais, ce qui avait marqué l’auteur. Il s’est juré de ne jamais l’oublier et écrit finalement un livre sur elle plus de vingt ans plus tard. Ce n’est pas une enquête policière ni journalistique, même que l’auteur admet qu’il est lui aussi seulement « un épais qui dispose d’une connexion Internet ». C’est plutôt un livre autour de la personne disparue, divisée en trois parties : d’abord de l’information sur Mélanie Cabay, principalement à partir de sources journalistiques de l’époque (c’est avant que l’Internet soit répandu et les réseaux sociaux). Ensuite, l’auteur décrit ce que lui faisait cet été-là, avec son style d’auto-dérision habituel. Cette partie sert à comprendre pourquoi cette disparition l’a marquée plus que d’autres. Il y a effectivement eu beaucoup de disparitions de femmes au Québec dans ces années, ce qui mène à la troisième partie : est-ce que la police faisait tout en son possible pour résoudre et empêcher ces meurtres? Il pointe sur certaines preuves de confusion et de manque de communication entre les différents corps de police qui permettrait à un criminel de passer plus facilement entre les mailles du filet en opérant dans plusieurs juridictions.

François Blais a un style détaché, basé sur l’auto-dérision, et les détails. On aime ou on déteste. Moi j’aime bien. Ici il y a énormément de détails pour rappeler le Québec 1994 d’un jeune de 19 ans. C’est aussi mon cas, donc cela me rejoint particulièrement, mais je crois que ça pourrait ennuyer quelqu’un qui n’a pas connu cette époque ici. L’auteur pose quand même des questions intéressantes sur les disparitions et la motivation pour les empêcher. Il y a d’autres preuves d’inaction de la police canadienne et québécoise dans les disparitions de femmes autochtones et de prostitués. Avec le recul, on se demande s’il n’y avait pas un préjugé que les femmes qui disparaissaient avaient osé monter dans le véhicule du meurtrier, donc laissant entendre qu’elle était « de mauvaise vie ».

4/5

RR

La seule chose qui intéresse tout le monde

Autour de 2070, les agents de la Parakaar évaluent la cote de sentience des premikas. Il s’agit d’androïdes très avancés qui parfois développent une conscience. À ce moment, ils sont retirés à leur propriétaire et mis hors circulation, dans une retraite. Lors d’une mission au Québec, il fait face à une situation étrange : il ne sait comment classer son sujet, et se retrouve bizarrement appelé en Inde. Il soupçonne une manœuvre autour de lui, de jouer un rôle qu’il ignore.

Les sujets de la conscience et de l’intelligence artificielle sont très vieux, par exemple le test de Turing et le film Blade Runner. Ils sont encore plus populaires de nos jours, alors que les ordinateurs ont de plus en plus de capacités, battant même les champions du jeu de go. Kazuo Ishiguro en a justement fait le sujet de son dernier roman. Il est donc difficile de se démarquer dans ce domaine, et François Blais n’y est pas parvenu selon moi. Pire, le récit n’est pas très fluide, car le récit est rempli de noms et mots indiens, l’auteur crée un futur où l’Inde a émergé de l’affrontement ruineux entre les États-Unis et la Chine, mais aussi scandinaves, car l’agent est Suédois. De plus, on trouve la description de nombreux détails qui n’apportent pas à l’histoire, de simples développements d’objets actuels comme des tubes pour voyager plus vite, un assistant personnel presque sur puissant, des filtres de traduction. Ceci me donne l’impression de quelqu’un qui « veut faire » de la science fiction, par opposition à des auteurs dont la SF semble naturelle : Ishiguro, Atwood…et aussi des mondes dans un futur complètement différent mais où ça ne semble pas construit de manière bancale (Tchaïkovski, Scalzi…). J’aime généralement François Blais, j’ai même été intéressé par le récit vers le 2/3, plein d’Espoir, mais la fin a été encore plus décevante que je craignais. Donc, malheureusement pour cet auteur que je respecte, un gros bof.

3/5

RR

Un auteur que je découvre et qui lme tente beaucoup. Malheureusement je ne sais pas s'il est facile de trouver ses romans en France?!