Neil JORDAN (Irlande)

De : s-lewerentz Envoyé : 2007-01-21 09:34
Neil JORDAN - Les ombres

Bonjour à tous,
Je viens de terminer ce dernier roman de Neil Jordan et je voulais vous donner (modestement) mon avis, car je trouve je l'ai adoré et vous le recommande à tous. En plus, on oublie un peu vite l'écrivain pour le réalisateur et c'est dommage, ce livre en est la preuve.

C'est vrai, je l'avoue, j'ai eu un peu de mal avec les 80 premières pages; trop de métaphores à mon goût (même si elles sont très belles), une surdose qui me rendait le texte parfois un peu "illisible", alors que l'histoire n'est déjà pas si simple entre les personnages "réels" et les "fictifs" (en réalité tous le sont). Il faut dire que Nina, le personnage principal, est une fillette à l'imagination débordante !

Puis, dès la seconde partie, le roman prend son envol, l'histoire est en place, les principaux protagonistes aussi et le récit enchaîne alors une séquence continuelle et bien orchestrée de chapitres présent et passé. Ceux au présent sont racontés par Nina elle-même, ou plutôt son fantôme, car dès la première page, on apprend qu'elle a été tuée par Georges, son ami d'enfance. Les histoires du passé sont narrées en alternance par Gregory et Janie, respectivement le demi-frère et la meilleure amie de Nina (à présent adultes).

L'histoire commence au début du 20e siècle en Irlande, où Nina, l'héroïne, une jeune fille plutôt bien née vit seule avec ses parents à Baltray House (une "big house" de la littérature irlandaise et anglaise). Il y a aussi Gregory, son demi-frère qui la rejoint en Irlande lorsque sa mère tombe malade, et avec lequel Nina se sent immédiatement en symbiose. Et puis, il y a Georges et sa soeur Janie, deux enfants pauvres qui vivent dans une cabane en tôle de l'autre côté de la rivière qui borde la maison de Nina. Si Janie est plutôt vive et dégourdie, son frère est le souffre-douleur de l'école qu'il quitte rapidement. Tous quatre deviennent inséparables et jouent souvent ensemble au bord de la rivière, se racontent des histoires et inventent des fantômes pour se faire peur. Et puis, en grandissant, ils découvrent l'amour et là, les choses se compliquent un peu, ce que le départ de Georges et Gregory pour la guerre n'arrange pas. Nina, elle, devient actrice. (pour l'histoire, je m'arrête là, car je ne peux pas tout vous raconter... !)

Le récit de Neil Jordan est vraiment superbe et prenant. Il reprend, comme dans "Lignes de fond" un style de narration qui alterne souvenirs et présent - c'est toutefois plus complexe ici. Il parle une fois encore de l'enfance, de l'imaginaire, voire du fantasmagorique, et s'amuse à nous embrouiller avec des noms de personnages intentionnellement proches (Georges et Gregory), et des fantômes. Visiblement, ces thèmes l'intéressent et il les a d'ailleurs aussi traités dans ses films "The butcher boy" et "Breakfast on Pluto", tous deux adaptés des romans éponymes de Patrick McCabe (un autre grand, à mon avis). En plus, l'humour n'est jamais loin !

Une belle lecture que je vous recommande grandement ! Et j'espère que d'autres oeuvres de Jordan seront traduites en français, car ses nouvelles de "Night in Tunisia" ou son court roman "The dream of a beast" valent aussi leur pesant de cacahouètes !