Georges ANGLADE (Haïti/Canada/Québec)

De: Polo

Georges Anglade - Ce pays qui m'habite

Georges Anglade est un Québécois d'origine haïtienne, né en 1944. Géographe de formation, il enseigne à l'université depuis des décennies. Après avoir écrit des essais, dont le premier date de 1974, voilà qu'il livre aux lecteurs depuis 1999 des lodyans, récits voisins de la nouvelle. Comme l'auteur le précise dans son oeuvre, c'est une "manière native de l'écrit d'origine orale... une miniature dans une mosaïque".

Ces lodyans retracent le vécu de l'auteur et ce dont il a été témoin. La première partie consacrée à son enfance à Quina est de loin la plus intéressante. Les us et coutumes, rapportés avec une teinte d'humour, témoignent de l'esprit d'un peuple, qui n'avait pas la vocation du martyre avant l'arrivée de Duvalier en 1954. Il était appelé à la joie de vivre, bien caractéristique des pays ensoleillés, où le mensonge se marie à la vérité comme les histoires de pêcheurs.

C'est devenu jeune homme que sa vie et celle de son peuple se sont gâtées. Du jour au lendemain, la parole est devenue plus que suspecte. Terminées les rumeurs que les gens colportaient. Pour se maintenir au pouvoir, Duvalier chassait le mot comme s'il était démoniaque. Il réduisit ainsi les siens au mutisme, eux qui souffraient de "parolite" aiguë. Ceux qui ne comprirent pas le message payèrent de leur vie les mots dits et les non-dits que l'on pouvait deviner sur les lèvres. Cette deuxième partie, très politique, montre comment Port-au-Prince devint rapidement Port-aux-Morts.

Pour échapper au massacre, bon nombre d'entre eux s'amenèrent au Canada, dont Georges Anglade. Dans cette partie, le quartier Côte-des-Neiges de Montréal prend la vedette à cause de sa population immigrante impressionnante. Comme les autres, les Haïtiens sont confrontés à la problématique de l'exil, qui les réunit à partir du vendredi soir dans les "coffee shops" pour panser les plaies du déracinement. La parole reprend vie, mais notre soleil ne sera jamais assez fort pour lui redonner sa vigueur d'antan. Ils sont quand même décidés de bien s'intégrer puisque le Montréal des métèques se transforme en un Montréal des métis. Ce dernier point, le plus faible de l'oeuvre, ressemble davantage à une analyse sociologique, parfois même assez ennuyeuse.

C'est une oeuvre valable malgré tout, structurée comme un vitrail par des parcelles de vie qui, réunies, composent un tout cohérent. C'est même lumineux à cause de l'écriture inspirée de l'oralité. Elle rend avec élégance même la couleur locale et se greffe avec discrétion aux québécismes dans la dernière partie, laquelle semble avoir demandé à l'auteur tout son "petit change" (énergie) pour la terminer. Malgré la situation dramatique que l'auteur exploite, il évite l'apitoiement en soulignant plutôt le dynamisme d'un peuple devant le mauvais sort que le pouvoir politique lui a lancé.

Note : 3.5/5
(Polo)
De: Georges Anglade

25 octobre 2003
Réponse à Polo

Je viens de lire votre critique du livre "Ce pays qui m'habite" et je ne peux m'empêcher de vous féliciter de la finesse de votre lecture. Vous avez parfaitement raison de trouver les textes de Quina plus enlevants et légers et les derniers laborieux à laisser l'impression de réclamer "tout le petit change de l'auteur", au bord du sociologique, etc. Vous dirais-je que c'est ainsi qu'il fallait lire ce livre quand comme vous, on a de la sympathie pour ce pays haïtien que vous devez certainement aider encore, que l'on est grand lecteur sans en faire métier et que commenter les livres à l'écrit est une activité à laquelle vous vous adonnez à chaque fois que cela est possible...

Je crois vous deviner Polo comme vous m'avez assez justement deviné dans ma démarche du début à la fin de ce livre.

Je vous dois quand même une explication que je vous soupçonne de savoir: ce troisième recueil fait partie d'un ensemble de trois livres aux 77 histoires (lodyans) et la place de chacun de ces romans-fleuves en miniature dans la mosaïque d'ensemble n'est pas celle anecdotique de chacun des recueils. À la fin du livre dont vous parlez vous avez l'agencement final des histoires dans un seul et même livre LE LIVRE DES LODYANS qui dit l'histoire d'une génération, la sixième génération haïtienne, de son enfance dans un village inventé Quina, aux années d'initiation Port-aux-Morts, à l'exil Nedge et l'impossible retour Terre-Promise (qui est toujours le Paradis perdu!).

Quand je travaille un texte c'est sa place dans le grand livre qui me guide et m'importe, et, sans aucunement amoindrir votre juste lecture du recueil 3, son ton, ses couleurs, son phrasé, son goût... tiennent à sa place dans le grand livre des aller-simples, de tous les exils de nos vies, la votre comme la mienne puisque nous ne reviendrons pas à l'enfance...

Ce que je crois ou plus justement ce que j'espère, c'est d'offir un jour ces trois recueils en un seul livre (un ensemble qui sera tellement différent des parties) pour que toutes ces histoires fassent une grande ronde et chacune y tienne la main de ses deux vraies voisines...

Des contraintes éditoriales m'ont amené à ainsi fractionner le livre en trois recueils, me reste à lui redonner sa forme originale dès que la chance passera.

l'auteur (Georges Anglade)

NB : je suis d'accord avec votre évaluation à 3.5 et c'est la note que j'accolerais aussi à chacun des trois recueils pris séparément. Vous dirais-je que l'évaluation du gros livre des 77 miniatures une fois recomposé... se méritera peut-être une autre note, moins ou plus, mais autre, certainement!

De : Mousseliine (Message d'origine) Envoyé : 23/03/2004 17:11

Georges ANGLADE - Ce pays qui m'habite

C'est un recueil de courts récits, appelés lobyans en Haïti. Le recueil est formé de trois parties selon le lieu où se déroule les histoires.

D'abord on est à Quina, un village de la campagne Haïtienne. Les six récits sont absolument savoureux. Le narrateur est un enfant ou un adolescent, il raconte des anectodes sur la vie quotidienne des gens de ce village. L'humour coule à flot, un humour plein de soleil, on entend rire les gens. L'écriture est simple mais stylisée. J'ai beaucoup aimé et j'en aurais pris davantage.

Ensuite c'est Port-aux-Morts, comme le titre le laisse supposer, ce n'est pas très gai. Le narrateur est un étudiant à l'Université, c'est la dictature avec le régime Duvalier. L'auteur rapporte certains évènements de l'époque, les récits sont tous intéressants. Une lecture prenante et instructive pour moi qui connaît peu Haïti et son histoire et c'est important de connaître l'histoire et la culture des gens qu'on côtoient à tous les jours. J'ai encore une fois bien apprécié.

Dans la dernière partie, les récits se déroulent en exil, à Montréal. Au départ ça me semblait prometteur, la première histoire est charmante et puis ça se gâte. Les quatre derniers récits sont décevants. J'ai eu l'impression que l'auteur s'adressaient à ses vieux copains, à ceux qui y étaient, et moi d'une oreille indiscrète j'essaie de suivre une conversation qui ne me concerne pas et je n'y comprends pas grand chose. Les propos sont décousus. Par contre les thèmes abordés sont intéressants juste que c'est raconté maladroitement.

Dommage, j'étais enchantée jusqu'à ces vingt dernières pages qui gâchent un peu mon impression d'ensemble. Ça reste que je vous suggère ce livre, on découvre Haïti et les haïtiens et ce en souriant plus souvent qu'autrement. Pour ma part je lirai très certainement les deux autres recueil de l'auteur... du moins si j'y trouve le même plaisir que dans celui-ci.

Note : 3.75/5

p.s. La dernière phrase m'a fait mal: "Et si, finalement, nous n'avions pas complètement perdu notre temps?" ... quand on voit se qui se passe à Haïti ces temps-ci...
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Georges Anglade est né le 18 juillet 1944 à Port-au-Prince (Haïti).

Il détient un doctorat en géographie du Centre de géographie appliquée de Strasbourg.

En septembre 1969, il s'installe au Canada à Montréal et fera partie de ceux qui fonderont l'Université du Québec à Montréal où il sera professeur en géographie sociale jusqu'en 2002.

Anglade est un anti-duvaliériste convaincu, ayant été prisonnier politique du régime en 1974 et ayant dû s'exiler à deux reprises.

Bibliographie

Les Blancs de mémoire , Boréal, 1999, 224 pages
Leurs jupons dépassent , Cidihca, 2000, 208 pages
Ce pays qui m'habite, Lanctôt, 2002, 122 pages
Et si Haïti déclarait la guerre aux USA? , Écosociété, 2004, 122 pages

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De : Mousseliine Envoyé : 12/04/2004 03:45
Georges ANGLADE : Et si Haïti déclarait la guerre aux USA?

L'histoire: La situation est désespérée en Haïti. La solution, une guerre qui détruirait tout ainsi Haïti pourrait être reconstruit par les différentes associations humanitaires. Un groupe d'individus s'organisent pour déclarer la guerre aux Etats-Unis et pour ce quel autre moyen que le pétrole, ils font courir le bruit qu'un important gisement de pétrole a été découvert.

C'est de la fiction, un court roman, mais j'ai l'impression que la fiction est un prétexte qu'utilise Georges Anglade pour déplorer les conditions de vie en Haïti et dénoncer la politique internationale des États-Unis, la France y écope également le temps d'un chapitre. Il le fait avec beaucoup d'humour, un humour ironique et qui frise le loufoque. Ça tient peut-être davantage de l'essai que du roman.

Une lecture agréable car on garde le sourire tout au long mais qui demande une certaine concentration si on ne veut pas rater les nombreux clins d'oeil de l'auteur. Ce n'est pas pour autant une lecture difficile, les chapitres très courts et l'humour allègent le sujet.

Un bon livre, à lire pour ceux et celles qui s'intéressent à ce qui se passe à l'extérieur de son chez-soi.

Note : 4/5

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De : Friisette Envoyé : 12/06/2004 17:49
Georges Anglade - Et si Haïti déclarait la guerre aux USA?

3.75/5

Je n'avais jamais lu cet auteur et au début, j'ai donc été un peu surprise par son écriture... Pas évident de s'y retrouver dans ses phrases longues et toutes ces allusions à la politique. Mais à force d'avancer dans la lecture, ça devient plus aisé et on finit par beaucoup apprécier. Par contre, si je devais faire un reproche, c'est que c'est trop court... Si tout avait été plus détaillé, je crois bien que l'intrigue y aurait gagné en clarté.

J'ai aussi vu cette oeuvre comme une critique détournée de tous les politiciens qui essaient de manipuler l'opinion publique à leur avantage. Mais surtout cette oeuvre montre comment certains petits pays pourraient avoir envie d'obtenir leur part du gâteau eux-aussi. Et je ne suis pas certaine que tout ça ne soit que fiction... Si l'écrivain y a pensé, il y a sûrement fort à parier que d'autres gens dans les pays du Tiers-monde ont déjà eu l'idée eux aussi...

Mais ce que j'ai surtout apprécié, c'est que tous ces pays tentaculaires qui ont leur nez fourré partout en prennent pour leur rhume. Il ne reste plus qu'à espérer qu'un jour où l'autre, sans avoir à guerroyer, ils comprennent qu'il faut cesser de magouiller pour chercher à faire son profit sur le dos des autres. Mais là je crois bien rêver en couleur...

Enfin, je remercie quand même tous ces auteurs qui comme Georges Anglade, ont le mérite de dénoncer. Et aussi d'écorcher ces gens qui se croient tout-puissants!

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De : lassy Envoyé : 30/03/2005 16:25

Et si Haïti déclarait la guerre aux USA?

Et si Haïti m'était conté

Petite fable à l'humour cynique,oeuvre de politique-fiction, quoique pas pas futuriste, puisque c'est en fait une petite histoire d'à peine quelques jours, qui prend place pendant la guerre d'Irak.
Il y a très peu de personnages, en fait, mais leur initiative complètement folle pour changer le cours des choses dans leur petit pays crée un sacré remue-ménage !!
Il faut effectivement être dans le coup, avoir suivi les évènements politiques internationaux de cette époque pour comprendre toutes les allusions de l'auteur...

très bon essai sous couleur de roman, je dirais, pour reprendre les termes de Mousseline !
3,5 / 5

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De : Lhisbei Envoyé : 12/04/2005 19:51

Et si Haïti déclarait la guerre aux USA
Ecosociété fiction 94 pages

Pendant la guerre d'Irak en 2003 Haïti décide de déclarer le guerre aux USA pour bénéficier ensuite d'une reconstruction aux frais du riche voisin du Nord. Les manipulateurs, escrocs et menteurs en tous genres se déchaînent. L'appat : le pétrole et un capitaine qui va débarquer avec un millier de réfugiés sur les côtes de la Floride. L'appat n'est qu'un leurre et tout le monde va courir : le Canada, les Etats Unis, la France... Une tempête dans un verre d'eau (Haïti est un tout petit pays) . Au final on trouve une fable déroutante, caustique et politiquement incorrecte où les hommes politiques, les manipulateurs en tous genres en prennent pour leur grade. La narration échevelée est déroutante, le rythme un peu trop rapide à mon goût. Les personnages sont décrits dans les grands lignes mais sans complaisance. J'ai l'impression d'être passée à côté de certaines choses parfois (je manque de culture géopolitique) mais globalement j'ai trouvé cette lecture enrichissante et divertissante. 4/5

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De : la-grande Envoyé : 02/05/2005 19:34

Et si Haïti déclairait la guerre aux USA

J'ai été fascinée par cette fable inventée par Georges Anglade - il utilise l'écriture pour dénoncer les politiques étrangères des USA et aussi, un peu, de la France. Un livre tout petit mais plein d'informations et d'un humour sarcastique (comme je l'aime). Je me suis bidonnée à l'idée de Denise Bombardier en ambassadeur et puis la démission de JEB... un rêve!

Je l'ai lu lentement, pour bien tout assimiler et, bien que certaines choses m'aient échappées, je pense avoir en avoir saisi les grandes lignes.

Merci Mousseline d'avoir partagé

Note: 4/5

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De : Mousseliine Envoyé : 06/07/2005 11:35

Georges Anglade - Les blancs de mémoire
(Boréal, 1999, 214 pages)

Voilà le premier recueil des lodoyans (courtes histoires) de Georges Anglade, divisé en trois parties:

"Quina" : L'époque avant Duvalier, l'enfance du narrateur (de l'auteur?). Une enfance heureuse, remplie de bons souvenirs, d'anecdotes réjouissantes, le soleil, la mer, le sable, les mangues... mais à quelques signes on voit venir ce qui va suivre.

"Port-aux-Morts" : Le régime duvalier. Le narrateur vit à Port-au-Prince. Anglade, ne raconte pas les atrocités crûment, c'est plutôt nuancé et ça, ça frappe davantage. C'est la terreur, l'insécurité, l'obscurité...

Nédgé : C'est l'exil, la vie à Montréal. Je m'attendais à de la douleur mais ce sont plutôt des petites histoires remplies d'humour et de bonheur mais dans certaines il y a un certain ressentiment face à ceux qui en ont profité...

C'est le troisième livre que je lis de Georges Anglade et c'est certainement le meilleur des trois. L'écriture est plus claire, plus littéraire, plus soignée, ce qui rend la lecture aisée et fort agréable.

J'ai beaucoup aimé, et je vous le recommande avec plaisir! En quelques heures vous allez découvrir Haïti et ça donne le goût d'aller plus loin dans la littérature de ce pays.

Note : 4.25/5

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De : Cocotte8017 Envoyé : 13/02/2006 00:58

Georges Anglade - Et si Haïti déclarait la guerre aux USA?

À partir de cette question, Georges Anglade inventera une fiction. En prétextant la découvrte d'un gisement de pétrole important en Haïti, ce pays fera tout pour que les États-Unis déclare la guerre. Haïti pourrait alors se faire reconstruire à grands frais.

À travers ce court récit, l'auteur écorche les politiciens manipulateurs qui veulent tou contrôler. Il dénonce avec sarcasme et ironie, ce n'est pas un récit dur ou violent. L'idée de départ est intéressant et nous permet de se poser des questions sur ce qui se passe ailleurs, sur les motivations de certains peuples et les conditions difficles des petits pays souvent écrasés par les plus forts.

Comme certains l'ont mentionné avant moi, j'ai eu l'impression de manquer bien des choses en lisant ce récit. Ma culture politique étant limitée, j'ai eu besoin de beauocup de concentration. J'ai relu certains passages pour mieux m'y retrouver. À cause de ces difficultés, je ne peux pas dire que ma lecture ait été agréable. Enrichissante? Ça oui!

Ma note : 3,25/5

Décès de Georges Anglade

http://www.ledevoir.com/international/actualites-internationales/281072/deces-de-georges-anglade

C'est d'une grande tristesse tout ça...

Ça me touche particulièrement... j'ai eu plusieurs échanges de courriels avec George Anglade suite au fait que j'ai critiqué un de ses livres. Il m'écrivait de longs courriels. Par la suite il m'a donné un exemplaire de tous ses livres.

Mousseline a écrit:Ça me touche particulièrement... j'ai eu plusieurs échanges de courriels avec George Anglade suite au fait que j'ai critiqué un de ses livres. Il m'écrivait de longs courriels. Par la suite il m'a donné un exemplaire de tous ses livres.

Wow ! Il est rare que les auteurs vont prendre la peine de répondre et en plus, leur donner des exemplaires gratuits !