Joyce Carol OATES (Etats-Unis)

Résumé : Darren est un adolescent de 16 ans, élève au lycée de North Falls. Il fait aussi partie de l'équipe de natation du lycée et surtout, Darren est si beau que tout le monde ou presque se retourne sur son passage, les filles du lycée comme certaines femmes dans la rue... voire certains hommes... Bref, Darren est sexy ! Et assez mal à l'aise avec tout ça, il faut bien le dire. Un jour, son prof d'anglais, Mr Tracy, lui propose de le ramener chez lui en voiture...

Mon avis : Me voilà en partie réconciliée avec JCO ! Je viens de passer un très bon moment à la lecture de ce roman, malgré le style qui continue à ne me plaire que très moyennement (nombreuses répétitions encore et toujours, italique partout, prénoms étrangement coupés en deux quand quelqu'un les prononce , bref tous ces petits trucs qui font le style d'un auteur et qui ici ne me séduisent pas...). Mais il faut reconnaître que le sujet est très bien traité (et très bien choisi car très actuel), que la lecture de Sexy est prenante et que le personnage de Darren est finement décrit du point de vue psychologique. Ce roman pourrait se lire d'une traite, je ne me suis lassée à aucun moment. Et la fin est plutôt pas mal, car pas simple de conclure une histoire pareille.
Par contre, ce roman donne une image vraiment peu reluisante de la société qu'il dépeint : ce père qui donne des conseils à deux balles à son fils, ce frère limite homophobe, la mère qu'on protège tout le temps, les copains d'école qui n'en sont pas vraiment, et toujours ce paraître, paraître, paraître au détriment de l'être, c'est vraiment triste. Heureusement que le personnage de Darren amène autre chose dans ce paysage !
En bref, une lecture intéressante, prenante et qui fait réfléchir sur l'un des sujets brûlants de notre époque.

Je persévère, malgré toutes les réserves que je garde vis à vis de cette auteure, et je viens donc de terminer Nulle et grande gueule. J'ai plutôt bien aimé, disons dans la même mesure que Sexy, lu récemment. Mais je crois qu'il faut que j'arrête de lire JCO en français, j'en suis même convaincue.
D'abord, je me suis dit : "Tiens, quel drôle de titre, alors voir le titre en anglais." Et là surprise : Big Mouth & Ugly Girl ! Big Mouth pour Grande Gueule, je veux bien, mais alors Ugly Girl pour La Nulle ?? Ce n'est quand même pas tout à fait le même sens, il me semble... Pourquoi pas La Moche ??
Ensuite, un truc qui m'agace : on sait pertinemment qu'on se trouve aux Etats-Unis, et on nous parle de collège, de lycée, de quatrième, de terminale, de CM2... Pourquoi transposer un système éducatif français à un autre pays alors qu'il suffit d'expliquer par une petite note de bas de page à quel âge ou à quel genre d'établissement le terme anglais correspondrait ? Sinon, on a qu'à dire aussi qu'Ursula joue à la pétanque et pas au basket, tant qu'on y est !! Et puis, je ne trouve pas ça terrible en termes d'ouverture à la culture de l'autre de calquer le contexte sur les représentations françaises. Ce n'est que mon avis, mais là, la traduction va trop loin et me semble ethnocentriste.
Finalement, je ne suis pas en train de vous donner mon avis sur le livre, mais sur sa traduction

Mon avis sur le livre : Outre les petites choses qui m'agacent perpétuellement chez Mme Oates (pêle-mêle : typographie, vision du monde assez limitée et très américano-centrée, personnages de parents vraiment pas fouillés et souvent bêtes), outre le fait que tout ça me semble quand même un peu exagéré (surtout les réactions de tout le monde -sauf Ursula- envers Matt), outre l'happy end rose bonbon (mais bon, on s'adresse à des ados, tout est relatif), cette histoire actuelle et sans temps morts m'a plu. Les deux personnages principaux sont charmants et je me serais facilement identifiée à Ursula si j'avais lu ce livre ado, car j'étais aussi une freak dans mon genre (mais pas le même). Les échanges de mails entre Matt et Ursula sont très réalistes, c'est un des points forts du roman : la narration via ce mode de communication actuel, avec la possibilité d'envoyer ou de supprimer et la menace que le mail "reste pour toujours dans le cyberespace" ( cette critique aussi ??? ). Intéressant aussi de voir mis en scène un des effets de la paranoïa suscitée par des tragédies dans les lycées des Etats-Unis. Ca fait froid dans le dos quand même, dans le sens où la liberté d'expression est bafouée :

"C'est la transgression des tabous qui provoque le rire. Parfois les gens sont choqués, et ils réagissent par le rire. Mais certains vous haïront et se retourneront contre vous. Il faut donc être prudent. Non que Matt soit très grossier. Un peu grande gueule parfois, mais... en quoi était-ce un crime ? Aux Etats-Unis, il y a une Déclaration des droits qui garantit la liberté d'expression. Non ?"

Reste que le point de départ de toute cette histoire, à savoir la dénonciation par deux "témoins" et la réaction du chef d'établissement à cette dénonciation, me semble assez tordu et contestable sur le plan du scénario. Mais bon, il y a dans la réalité même des absurdités sans nom, alors pourquoi ne pas en mettre une dans un livre, soit.