JEANNE LA PUDEUR de Nicolas GENKA

Pour perpétuer la tradition que j'ai de proposer des romans sortis des sentiers battus, des romans anticonformistes que certains jugent comme provocateur, voici "Jeanne la pudeur" de Nicolas Genka.


Voici les copier-coller de la présentation de l'auteur et mon avis de ce roman, lu en Mai 2020. Hâte de recueillir vos impressions


Nicolas GENKA


Fils d'un Breton et d'une Allemande nommée Höhn, Nicolas Genka naît le 3 décembre 1937 à Quimper. Français par son père, il dispose également de la nationalité allemande. Il a une sœur, Renée.
Il vivra une enfance difficile, son père devenant alcoolique et sa mère perdant la raison et mourant en 1951. La même année, à 14 ans, il part vivre chez un oncle russe à Douarnenez.

Nicolas Genka fait son entrée en littérature avec L’Épi monstre, roman centré sur l’inceste père-fille, écrit à son retour de la guerre d’Algérie. Préfacé par Marcel Jouhandeau, le livre est édité par Françoise d'Eaubonne chez Julliard.

Publié en décembre 1961, L’Épi monstre connaît un certain succès de librairie avant d’être interdit par le ministère de l’Intérieur par un arrêté du 6 juillet 1962. Il devait être à l’origine traduit par Pier Paolo Pasolini, Yukio Mishima et Vladimir Nabokov, des parrainages significatifs.
Jean Cocteau lui décerne le prix des Enfants-Terribles, créé pour l’occasion. Cet ouvrage vaut également à son auteur de voir sa maison en Bretagne mise à sac et un procès par son beau-frère qui l’accusa d’avoir écrit non pas un roman mais une autobiographie. À partir de 1999, date de sa réédition, le livre semblait toléré, sans toutefois que l’arrêté d’interdiction n’ait été abrogé ; il ne le fut que par un arrêté du 25 juillet 2005, à la suite d'une décision d'annulation du Conseil d'État du 27 juin 2005.

En 1964, Nicolas Genka publie Jeanne la pudeur, soutenu par Louis Aragon et Jean Paulhan. Il obtient le prix Fénéon. En 1968 paraît L’Abominable Boum des entrepôts Léon-Arthur.

Par la suite, Nicolas Genka se retire en Beauce et cesse de publier pour une longue période.

En 1999, Nicolas Genka est redécouvert lorsque L’Épi monstre et Jeanne la pudeur sont réédités. En 2001 devait paraître son quatrième ouvrage, Les Premières Maisons de la ville, supposé constituer le premier tome d’un cycle romanesque de neuf romans, intitulé Sous l’arbre idiot, qu'il avait rédigé tout au long des trente années de son isolement ; il n'est jamais sorti ni aucun des autres romans de la fresque.

Il meurt le 13 janvier 2009 à Nogent-sur-Marne, à l’âge de 71 ans.


[size=21]JEANNE LA PUDEUR
Nicolas GENKA
J’ai lu 127 Pages
 
Résumé (4° de couverture)
 
Jeanne, Jeanne la pudeur, Jeanne la putain. Jeanne aux robes de Pigalle et aux cigarettes trop longues. Dans le village où elle revient, fière, au bras d'un nègre puis d'un jaune, on la hait. Elle est le scandale, la passion charnelle, la honte. Après le suicide de son père, Jeanne cache sa décrépitude dans la maison de sa naissance. Rongée par ses souvenirs, crucifiée par les hommes du pays, la paria crie son horreur et son désespoir d'être prisonnière d'un corps pourri. Elle est l'amour et la solitude. Un homme encore, pourtant, est sur les traces de Jeanne. Animé par une rage froide, expiatoire, il rendra son honneur à la putain qui va mourir. Les échos de la guerre mêlés à une rumeur de blues, l'ivresse poétique du corps dans un univers d'absolue violence... Une expérience bouleversante et purificatrice.
 
Mon avis :

Voici le 2° roman d’un auteur maudit, comme je les aime. Comme précisé dans sa biographie précédent cet avis, c’est son roman « L’épi monstre » qui a fait l’objet d’une censure des autorités gouvernementales des années 60, le « Jeanne La Pudeur » ayant subi le même sort. Je n’ai pas lu « L’épi monstre » et ne peux donc pas juger du bienfondé de cette censure le concernant. Sa nouvelle publication en 1999 n’a choqué personne. Mieux sa réhabilitation a été prononcée en 2005, ce qui tenterait à prouver de l’abus de pouvoir exercé par certains esprits bien-pensant de l’époque. Mes recherches pour trouver « L’épi monstre » en version poche restent vaines. Est-il au moins sorti dans ce format ? Si non, je me dirigerai vers une version d’origine. Coûte que coûte il me faut lire ce roman !!
 
Mais revenons au roman qui nous intéresse pour cet avis : Jeanne La Pudeur.

Tout d’abord et pour la petite histoire, j’ai découvert Nicolas Genka à travers une interview de Bernard Pivot que lui avait consacrée (et que je ne retrouve plus sur aucun moteur de recherche. Si je retrouve le lien je ne manquerai pas de le diffuser). Son histoire m’avait interpelée. J’ai fait des recherches de biographie et d’œuvres, et me voici pour cette présentation.
 
Si je voulais faire rapide, je dirai : « C’est du jamais lu !! » Je parle du style. D’ailleurs ce livre est un exercice de style si innovant qu’il met en retrait l’histoire et l’intrigue.
L’emploi d’une surabondance de métaphores poétise la tragédie comme aucun roman de ma connaissance. Il faut d’ailleurs se laisser porter par les mots en acceptant parfois d’échapper à la compréhension de l’intrigue qui passe au second rang de l’intérêt de la lecture. Une folie des mots pour décrire une folie d’événements, voilà comment résumer le mieux le style.

Extraits :

« Il fume, il ne fait pas de bruit, il est désert, cet homme, et son ombre l’assiste, attentive. La fumée gicle par saccades de sa lèvre brutale mal rasée, elle s’en va rêver dans l’automne. Lui reste ainsi debout, l’œil à la traine ; il prend son temps, puisque la pluie s’en est allée vers Singapour, vers Tokyo, la pluis contemporaine épouvantée »
 
«  Mais la nuit, la superstition, le bois qui chante, écoutent la promesse : un homme va venir. Et des gouttes de sang battent dans les pendules, et la plaine suffoque, et l’herbe devient blanche.
Et bientôt le sang perce aux canines des ronces ; bientôt la mort blottie entre les yeux des souches, noire se décarcasse et rampe sur la plaine, et la plaine tourne en un linceul de songe »

Voilà ce livre n’est fait que de cela, que d’une prose de haute poésie. Alors les 127 pages qui composent ce roman ne se lisent pas aussi vite qu’un tout autre roman. Elles demandent même 2 lectures. Une première pour l’intrigue, la seconde pour la poésie.
 
Une chose est sure. Ce roman ne mérite aucune censure. Pire, je pense, à défaut d’être peut-être prochainement convaincu, que cette censure nous a privé d’un exceptionnel romancier.
 
Ma note : 4 /5
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DKOIS, je serais plus nuancée sur la censure et la pudibonderie des années 1960.
L'enfer existait toujours dans les bibliothèques et certains livres (comme ceux dont tu parles) ont pu souffrir de l'activité répressive des ligues de vertu qui ont été actives avant 1968; à partir de cette époque "il fut interdit d'interdire"...
Les éditeurs Jean-Jacques Pauvert , Losfeld, Tchou, Régine Desforges ont été souvent inquiétés. Mais Lolita a été publié dans les années 50, les livres de Gide célébrant son amour des petits garçons, mal vus par l'église, étaient publiés et somme toute, la pédophilie mieux acceptée que l'homosexualité... Certains devaient bien passer à travers les mailles du filet...
Sujet intéressant et qui faisait couler beaucoup d'encre...inq

Cinquante cinq ans après 1968, nous en sommes où ?

Awara: Nous avions déjà eu cette conversation concernant les interdictions et principalement celles concernant la pédophilie. Pour première information ce "Jeanne la Pudeur" ne concerne pas la pédophilie mais plutôt des relations anticonformistes. 
Je pense toujours qu'il faille différencier les auteurs qui rédigent un roman en évoquant des événements sensibles (pédophilie, shoah, infanticide, ...) et ceux qui en font la promotion. La frontière est parfois difficile à discerner, je l'accorde. L'exemple de "Lolita" est un exemple concret, même si j'ai ma propre idée.
Oui la révolution culturelle de 68 a fait bouger les lignes dans le positif de manière générale mais aussi avec certains excès. Si on revient au thème de la pédophilie, une liberté d'expression a ouvert des portes qui n'auraient jamais du l'être. N'oublions pas qu'un Daniel Cohn-Bendit a avoué avoir eu des relations sexuelles avec de jeunes enfants (mais c'était dans l'air du temps...). Que Gabriel Matzneff venait vendre chez Pivot ses œuvres pédophiliques en toute impunité et avec la caution de ses homologues d'un soir. 
Selon mes informations, "L'épi monstre" (le 1° roman de Nicolas Kenka) fait parti des romans de pure fiction, de pur contexte. J'ai longtemps cherché ce roman qui ne semble pas être paru en version poche. Aussi je pense faire une exception et l'acheter en version broché pour avoir un propre jugement. 
La chose sure est que cet auteur a été une étoile filante du monde littéraire Français car victime de la censure. Je retiens de ma lecture de "Jeanne la Pudeur" un style incomparable et donc le regret de ne pas avoir pu profiter d'une plus ample bibliographie.
Il y a beaucoup d'article sur le net le concernant. Je vous invite, toutes et tous, a les consulter. Son histoire vous incitera à découvrir son œuvre, j'en suis persuadé.

En effet, une lecture qui ne doit pas laisser le lecteur indifférent j'ai l'impression.
A la lecture du résumé et des extraits, cela n'a rien pour me plaire. Mais je ne vais pas être désagréable avant de l'avoir lu
Il semble très court donc je tenterai peut-être l'expérience. Dommage, il n'est pas dans ma médiathèque... Mais à suivre !

Suite à la discussion de la semaine sur le forum je vous propose une lecture commune de ce livre qui peut faire couler de l'encre .
A priori ce n'est pas le livre qui nous aurions choisi mais pourquoi pas !
Que dites vous de commencer la première semaine d'Aout le temps de l'avoir .
Qui serait partant ?

Je l'ai commandé il devrait arriver début Aout

Je vais lire quelques pages aussi demain .Tu termines ta lecture en cours d'abord ou tu le lis maintenant ?

pas eu le temps de m'y plonger aujourd'hui .Je le fais demain

Je vois que notre poil à gratter DKOIS à fait un choix qui lui correspond bien...

J'en suis a la page 45 j'avance doucement étant donné que je lis un autre roman en même temps .Jusqu'au viol on arrive a suivre c'est à dire jusqu'à la page 20 mais après je ne sais pas quelle substance l'auteur a pris mais j'ai l'impression qu'il a "fumé la moquette" ... Je comprends pourquoi Geromino disait qu'il ne comprenait rien

Vos impressions me laissent quand même un peu perplexe et dubitative

Je ferai une tentative à mon retour !

[quote="Dkois"]
L’emploi d’une surabondance de métaphores poétise la tragédie comme aucun roman de ma connaissance. Il faut d’ailleurs se laisser porter par les mots en acceptant parfois d’échapper à la compréhension de l’intrigue qui passe au second rang de l’intérêt de la lecture. Une folie des mots pour décrire une folie d’événements, voilà comment résumer le mieux le style.

Je viens de relire la présentation de DKOIS je reprends donc le livre comme il le dit

Je vous ai laissé mon avis ici: Jeanne la pudeur  . Curieux de connaître d'autres avis!

Je ne lis jamais les avis avant la fin de ma lecture mais cette fois j'ai lu celle de Geromino . 
J'avance en me disant que cela va s'éclairer mais ce roman est toujours une enigme et d'après l'avis de Geromino cela va le rester .

En commun accord avec Kattylou : si l’un de vous a envie de participer et de découvrir ce livre , je vous l’envoie avec plaisir ! N’hésitez pas ! Même outre Atlantique !